Assemblage organique et réinvention des codes traditionnels convolent chez Kiko Kostadinov
La collection automne-hiver 2025-26 de Kiko Kostadinov explore un univers brut et transformable, où matériaux et silhouettes se réinventent à travers l'influence du cinéma de Béla Tarr et des traditions artisanales.
Le défilé automne-hiver 2025-26 de Kiko Kostadinov marque un virage esthétique radical par rapport à la saison précédente, abandonnant le minimalisme clinique au profit de silhouettes plus amples, texturées et rugueuses. L'influence du cinéaste hongrois Béla Tarr est omniprésente, ses films dépeignant des personnages pris dans des environnements extrêmes et isolés, où le monde extérieur envahit insidieusement l’individu, jusqu’à imprégner ses vêtements. Cette idée se reflète dans des vêtements qui semblent en constante mutation, assemblés de manière organique, comme si chaque pièce était un prolongement de l’environnement qui l’entoure.
Les matières et constructions se superposent, créant des effets de textures et de couleurs en résonance tout au long de la collection. Le jeu sur les distorsions matérielles, inspiré par les œuvres de Kon Trubkovich, introduit des teintes vives comme l'orange intense, le jaune et le bleu céleste, perturbant la lisibilité du corps tout en évoquant une sensation d’étrangeté. Les influences traditionnelles hongroises et bulgares sont également perceptibles, notamment dans l’utilisation de tissus militaires et artisanaux réutilisés de manière imprévisible, comme des broderies issues de motifs de pièces de monnaie ou de bibelots, et des jacquards de coton lourds tirés de jupes traditionnelles et de nappes.
Les pièces deviennent des objets en perpétuelle transformation : les manteaux en laine shaggy et les uniformes militaires évoquent une certaine élégance pragmatique, tandis que des pulls thermiques et des blousons en jersey compressé se mêlent à des éléments plus utilitaires comme des bottes d’armée bulgares et des sacs en cuir qui bisectent les silhouettes. Cette idée de réassemblage prend forme dans des manteaux et blousons à triple construction, juxtaposant laine côtelée, coton rayé et jacquard brodé, ou velours relevé et laine à carreaux déstructurée.
Les lignes de coutures sont subtiles, asymétriques, comme un hommage aux personnages de Tarr souvent capturés en mouvement, révélant la coupe des vêtements sous un angle nouveau. Les K-darts, éléments de branding caractéristiques de Kiko Kostadinov, se multiplient sur les blousons et manteaux, tandis que des détails comme les colliers de boutons ou les fermetures éclair dévoilent des nuances de formes lorsqu’on les observe sous un autre angle. Enfin, la collaboration avec Asics, qui réinterprète les chaussures tabi iconiques, ajoute une touche de sportivité à cette exploration de la fonctionnalité brute, tout en renforçant l'idée que chaque vêtement a une histoire qui se réécrit au fil du temps, dans un processus de transformation constante.