La Haute Couture vertigineuse de Valentino par Alessandro Michele
À travers une collection audacieuse et poétique, Alessandro Michele transforme la mode en une exploration infinie de références, d’histoires et de significations.
Le premier défilé Haute Couture de Valentino sous la direction d'Alessandro Michele, intitulé Vertigineux, s’est révélé être une plongée poétique et labyrinthique dans l’infini de la création. Inspiré par les réflexions d’Umberto Eco sur le "vertige de la liste", Michele a construit sa collection comme un catalogue infini, une accumulation de références qui, loin de chercher à tout ordonner, joue avec la dispersion et la vertigineuse multiplication des significations. Chaque robe devenait ainsi un "vertige" en soi, une liste ouverte qui mêlait matières, émotions, influences picturales, références cinématographiques, héritages historiques et traces symboliques. À travers cette accumulation, l’objectif n’était pas de contenir le chaos, mais de l’invoquer et de le contempler, dans un mélange de rationalité et d’irrationnel.
Comme le suggère Eco, la liste peut être à la fois une tentative d'ordre et un appel à l'infini — et cette dualité se retrouve pleinement dans cette collection. Les quarante-huit robes ne sont pas simplement des créations de mode ; elles sont des archives vivantes, des nœuds de significations tissées, où chaque élément, du tissu à la couleur, de la coupe à l’histoire qu’elle évoque, s’entrelace pour former une constellation d’images et de souvenirs, une cartographie émotionnelle. Le tout se manifeste dans un flot incessant d’associations, une danse d’échos, de réminiscences et de juxtapositions, créant une expérience sensorielle de vertige et d’extase.
Alessandro Michele ne cherche pas à achever la liste, mais à la suspendre, à la rendre infinie, comme un "etcetera" qui refuse la clôture. Cette collection est un "zodiaque des fantômes" à la manière d’Italo Calvino : un espace où chaque fil, chaque couture, chaque trace de couleur s’étend au-delà du visible, vers un au-delà du dire. Les robes deviennent des toiles de significations entremêlées, dans un flot d’idées, d’inspirations et d’histoires croisées, suspendues à l’orée d’un vertige créatif qui ne cherche pas à maîtriser, mais à laisser se déployer le potentiel infini de la mode en tant que langage. C’est un voyage dans la multiplicité, un "cartes et territoires" vivants, un monde où chaque couture est une parole qui, tout en restant suspendue, devient une histoire, une mémoire, une vision.