Femmes

À Budapest, chez Szandra Sándor, créatrice de Nanushka

Entre héritage historique et modernité minimaliste, Szandra Sándor, la créatrice de mode de Nanushka, incarne la nouvelle scène artistique hongroise. Rencontre dans son loft de Budapest, situé dans une ancienne zone industrielle.
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Inspirée par ses voyages, Szandra Sándor ne s’absente pourtant jamais trop longtemps de sa ville natale. Née à Budapest, elle a grandi dans l’univers du vêtement. “Ma mère était une créatrice de mode pour enfants.” Son père était gynécologue. Elle reçoit de ses parents une éducation ouverte et portée sur les langues. “J’ai suivi des études en anglais et on m’a même envoyée une année, à 9 ans, étudier au Portugal.” Après le lycée, elle rejoint l’Angleterre et le London College of Fashion, dont elle est diplômée. À son retour, en 2005, forte de ses quatre années passées dans la capitale anglaise, elle lance son propre label, Nanushka (surnom qu’on lui donnait enfant). “Je n’ai jamais eu envie de travailler pour les autres. J’ai commencé dans les ateliers de ma mère.” Sa première collection, été 2006, est un succès local et international immédiat. “C’était la bonne période en Hongrie. Le pays était en attente de nouveauté et j’ai eu la chance de connaître des amis qui m’ont aidée pour la distribution aux États-Unis.” 

 

Mais le tournant survient en 2016 lorsque son fiancé, Peter Baldaszti, la rejoint dans l’aventure en qualité de directeur général. “Il a tout de suite aimé le produit et imaginé le potentiel de la marque. Il nous a aidés dans l’organisation d’une nouvelle levée de fonds et nous avons déménagé dans de plus grands locaux qui regroupent les bureaux et les ateliers où nous fabriquons tous nos prototypes. D’ailleurs, 85 % de nos collections sont faites non loin, en Hongrie. Peter nous a permis de restructurer le commercial, la communication et l’identité de la marque. Il nous a apporté un nouveau souffle et fait profiter de son ambition et de son expérience. Aujourd’hui, Nanushka emploie plus d’une trentaine de salariés”, raconte Szandra. Entrepreneur dans l’âme, le jeune homme est à l’origine des restaurants les plus branchés de Budapest, au total cinq établissements qu’il a revendus l’an dernier pour se consacrer pleinement à Nanushka. “Nous sommes tous deux perfectionnistes et maximalistes. Nous voyons les choses en grand.”

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L’Art du contraste

Depuis leur rencontre, il y a quatre ans, Peter et Szandra ne se quittent plus. “Nous adorons les road-trips et nous partons souvent avec notre chienne Ginie. La Hongrie a une position centrale. On est à trois heures en voiture de Vienne et neuf heures de la Toscane où nous nous rendons régulièrement.” Le couple apprécie aussi le sud de la France et l’Andalousie, notamment Marbella. Adepte d’artisanat, Szandra aime chiner et rapporter des objets venus du monde entier. Chez elle, on trouve des tapis, des tissus, des paniers, des porcelaines, des céramiques de Bali, de Marrakech, de Tokyo ou d’ailleurs. Installé depuis un an dans un loft qui surplombe le Danube, le couple a choisi de vivre dans l’immeuble mitoyen de leur nouveau lieu de travail. Traversée par le Danube, la capitale hongroise est composée de Buda, sur la rive occidentale, verte et vallonnée, et de Pest, sur la rive orientale, plus peuplée et animée. “J’ai grandi côté Buda, dans le quartier historique du château royal, mais je vis désormais du côté Pest, dans une ancienne zone industrielle.

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C’est une expérience totalement différente. Le charisme de cette ville tient à la coexistence de l’élégance métropolitaine de la Belle Époque et du brutalisme socialiste”, confie Szandra. Une dichotomie topographique et esthétique qui inspire inconsciemment à la créatrice cet art du contraste que l’on décèle chez elle et dans son travail. Le style de leur appartement est résolument éclectique. Un assemblage de mobilier moderne milieu du xxe siècle, de design vintage hongrois et de pièces Arts déco avec des touches exotiques. “Certains meubles proviennent d’anciens restaurants de Peter, d’autres ont été dégotés par nos soins et d’autres, plus anciens, comme mes lampes de chevet, sont ceux de mon enfance.” L’appartement, avec ses grands volumes, est propice aux réceptions, que le couple apprécie. “Peter cuisine très bien. Sa spécialité est un plat convivial à base de banane plantain, de poulet, de riz et de haricots.” Matinale, la créatrice débute sa journée par une balade avec sa chienne le long du Danube. “Je pratique la gym et le yoga trois fois par semaine, le tennis et la marche le week-end, dans ma maison de campagne familiale, à vingt minutes de Budapest.” Elle rejoint généralement en fin de matinée son bureau et, le soir, lorsqu’elle ne sort pas dîner, la jeune femme apprécie de rester à la maison avec un livre et un bon verre de vin. 

“Le charisme de Budapest tient à la coexistence de l’élégance métropolitaine de la Belle Époque et du brutalisme socialiste.” Szandra Sándor
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Subtile féminité

Déterminée et intuitive, elle a toujours eu un goût sûr en matière d’habillement. Son uniforme au quotidien ? Une chemise oversize, un jeans et un manteau d’homme. “Je ne fais aucun compromis avec le confort. Je privilégie l’allure naturelle et décontractée.” Sa philosophie lui est inspirée du mouvement Bauhaus : “Le beau doit suivre le fonctionnel.” Dans son placard, on retrouve des jeans, sa matière de prédilection, et des pièces vintage. “Je ne garde que les vêtements qui me procurent de la joie. Après avoir lu le bouquin de l’essayiste japonaise Marie Kondō *, je me suis mise à éditer mes armoires.”
Faites d’un mélange de détails inattendus, de subtile féminité et de versatilité, ses créations pour Nanushka sont à son image. Sa marque de fabrique ? Les trench-coats qu’elle revisite chaque saison, le cuir végétal et le denim. “J’aime les pièces faciles à porter et à entretenir, qui peuvent se revêtir de jour comme de nuit.” En atteste sa collection printemps-été 2018, conçue comme le vestiaire idéal d’une voyageuse composé uniquement de pièces pratiques qu’elle affectionne. “Il y a un véritable lien entre l’esprit de la marque et le voyage. Ouvert, observateur et réceptif, le voyageur a un état d’esprit qui ne cesse de m’inspirer quand je crée.” Disponible sur son e-boutique, la collection printemps-été est également proposée sur Net-a-porter qui, la saison dernière, a désigné la griffe grande découverte, et sera présentée dans un pop-up store à Los Angeles d’avril à juillet. La boutique Nanushka de Budapest, quant à elle, vient de rouvrir après un lifting. Redécorée par Peter et Szandra, elle prend l’allure d’un concept-store : “Nous y avons installé un café et proposons, en plus de nos créations, de la lingerie, des bijoux et des photographies.” 

 

Le Budapest de Szandra

Downtown Market, un spot gastro aux allures de marché paysan (Hold utca 13).

Szimply, au petit déjeuner (Károly körút 22).

Dobrumba, un bistro cool au cœur du quartier juif (Dob utca 5).

Déryné Bistro, un café historique et charmant (Krisztina tér 3).

Fáma Étterem, un restaurant élégant et contemporain (Attila út 10).

Kollázs, un -restaurant génial pour son atmosphère et son service, au Four Seasons (Széchenyi István tér 5).

Boutiq Bar, un véritable bar à cocktails gourmet (Paulay Ede utca 5).

Asztalka Cukrászda, superbe pâtisserie (Döbrentei utca 15).

L’Hôtel Gellért et ses thermes (Szent Gellért tér 1).

Les thermes Széchenyi, parmi les plus grands d’Europe (Állatkerti körút 11).

Repertory, un concept-store poétique (Alagút utca 4).

Le marché aux puces Ecseri (Nagykőrösi út 156).

Pontoon, un night-club au bord du Danube (Antall József rakpart 1). 

Nanushka Store (Bécsi utca 3).

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