Et si la Brasserie du Lutetia était la plus belle surprise de l'été ?
Le Chardenoux de Cyril Lignac amorçait cet hiver la tendance : la mer et ses richesses étaient dans le vent - soufflant dans les voiles des flexitariens, moins carnassiers qu'hier mais toujours amateurs de poissons et de crustacés. Lorsque nous apprenions que Gérald Passédat, trois étoiles au Michelin pour son Petit Nice marseillais, prenait les commandes des cuisines du seul Palace de la Rive Gauche, à la fibre si parisienne, avouons que nous étions un rien dubitatif. Ce petit rien qui en nous fronçait les sourcils a été balayé en quelques coups de fourchette. L'excellence des huîtres (la moindre des choses diriez-vous, mais non, un tel casting est rare) et la douceur de leur baiser iodé, la puissance onctueuse de la brandade, en soi une leçon de cuisine, harmonisant la puissance du poisson, le crémeux de la texture, le gratinage délicat, délivrant une note finale profonde révèlent autant une profonde compréhension des lieux pensés façon paquebot Art Déco, que la présence d'un Chef, investi, soucieux d'être autre chose qu'un consultant de passage. Prouesse technique, le poisson farci réussit à illuminer la nacre de la chair et le croquant des légumes. Le soufflé aux fruits de la passion, un des desserts les plus casse-cou du répertoire culinaire, pouvant tourner à la punition calorique, ou s'envoler façon montgolfière, donne le coup de grâce - littéralement, achevant avec finesse une remarquable balade en haute mer, guidée par un service au diapason, attentif et désarmant de gentillesse.