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Le Prince Harry est-il (vraiment) capable de se ranger ?

Ex-bad boy fêtard, le prince de 33 ans semble s’être enfin assagi. Sauf qu’en épousant une femme divorcée, plus âgée et métisse, il affiche encore sa punk attitude face à une monarchie archaïque. Et prouve ainsi qu’il est bien le digne fils de sa frondeuse de mère, Lady Di.
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Nous sommes à J-2 du tant attendu mariage de Henry de Galles, fils cadet de Lady Diana et du prince Charles, avec l’ex-actrice Meghan Markle, qui aura lieu le 19 mai devant un gâteau bio, les Spice Girls live (selon la rumeur), 600 invités officiels dans la chapelle du château de Windsor et 2 640 personnes (des gens ayant “servi leur communauté”, selon le communiqué royal, ainsi que des élèves des écoles locales et des employés de la Couronne), invitées à la garden party.

Et une chose semble tarauder le prince plus que tout  : retrouver la forme ainsi que son corps d’ancien soldat de l’armée britannique ayant combattu en Afghanistan. Coaché par sa fiancée, qui était il y a peu encore bloggeuse lifestyle, Harry bosse dur pour perdre du poids, s’est dégoté un nutritionniste et débute l’exercice dès 7 heures du matin, tel un adepte du gourou Gwyneth Paltrow. Il a même arrêté de fumer et limité l’alcool, qui fut longtemps son meilleur ami. Le vrai motif de ce virage healthy ? Assurer la vigueur de sa semence, le couple le plus épié d’Albion voulant ardemment enfanter de royaux bambins. Meghan et Harry seraient-ils en train de devenir aussi boring que les trop preppy Kate et William ?

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Harry le terrible

Difficile à croire. Car personne n’a oublié le sobriquet du petit prince rouquin. “Dirty Harry”, c’est ainsi que les tabloïds friands de ses frasques à répétition ont surnommé Henry Charles Albert David (de son vrai nom).

Comme sa mère, qui n’est jamais vraiment rentrée dans le rang, Harry aura, dès l’adolescence, défrayé la chronique. À 17 ans, l’enfant terrible est pris en flagrant délit de fumette de cannabis et se retrouve envoyé en désintox. Suivent les bagarres avec des paparazzi à la sortie des clubs, la boisson et les femmes, beaucoup de femmes. Surtout des jolies blondes (Chelsy Davy, Cressida Bonas, etc.). Le bad boy se coltinera même une image d’amant torride après avoir été immortalisé nu dans une suite d’un hôtel de Las Vegas avec plusieurs filles dévêtues. Pire que ces âneries, le Charlie Sheen du gotha est photographié en 2005 déguisé en nazi lors d’un bal costumé, juste avant les cérémonies de commémoration du génocide juif au Royaume-Uni. Le Sun publie le cliché en une, titré d’un violent “Harry the Nazi”. Une honte pour sa famille et l’Angleterre tout entière, dont il est censé incarner le chic et le flegme légendaire. Quelques jours plus tard, il se répand en excuses, mais le mal est fait. En 2009, une vidéo du prince appelant “our little Paki friend” un soldat pakistanais fait surface. “Inacceptable” pour David Cameron et une bonne partie de la plèbe. La coupe est pleine ?

Harry le terrible

Lors de ses nombreux voyages (Afrique du Sud, Namibie, Tanzanie, Botswana), Harry a montré qu’il était un homme de terrain et non un dandy amateur de palais confinés, de corgis et de thé chaud. Le jeune homme a ainsi fait fondre beaucoup de déçus de la Couronne et gagné ses galons de gentleman.

Fils à maman
Fils à maman

Pas tout à fait car, étrangement, le monde entier ne semble pas lui en tenir rigueur. Pour les midinettes, le rouquin représente même un fantasme avec son regard de chien perdu, son teint rougeaud, sa silhouette un peu épatée et ses faux airs de héros de Judd Apatow : imparfait, maladroit et touchant. D’ailleurs, son mal-être viendrait d’un trauma profond. En 2017, le “Ginger Prince” s’expliquera sur ses sorties de route en évoquant le traumatisme de la mort violente de sa mère dans un accident de voiture à Paris, deux semaines avant son 13e anniversaire. Faire son deuil devant la planète ne sera pas une mince affaire. Il expliquait l’an dernier à la BBC avoir eu besoin de temps et d’une bonne thérapie avant de pouvoir relever la tête : “Ma mère venait juste de mourir et j’ai dû marcher un long moment derrière son cercueil, entouré par des milliers de gens qui me regardaient, pendant que des millions en faisaient de même à la télévision.” Pendant l’enfance, le jeune garçon aurait aussi douté de l’identité de son père. Et il s’agissait du capitaine James Hewitt, l’amant de maman ?

Si le public pardonne à Harry, c’est aussi pour sa générosité. Le roux tourne. Soldat pendant dix ans, il n’a pas hésité à aller vraiment au front (et a obtenu pas mal de médailles), et ce sportif infatigable qui excellait en polo et en rugby a fondé les Invictus Games en 2014. Ces jeux sportifs font concourir des soldats blessés et handicapés pour qu’ils retrouvent leur dignité. Harry s’est aussi impliqué dans de nombreuses causes caritatives, à l’image de sa mère. D’ailleurs, ce n’est pas seulement au McDo que Diana emmenait ses enfants pour leur faire prendre conscience des réalités, mais aussi dans des centres pour SDF. Marqué par les actions de Diana, le jeune homme suit lui aussi son –  grand  – cœur. On garde en tête l’image d’un Harry au Lesotho, en Afrique, travaillant avec des enfants orphelins, administrant des tests HIV à la Barbade au côté de Rihanna ou se battant pour protéger l’environnement et les animaux. Son salut, le prince le doit à la philanthropie. En aidant les autres, Harry s’est aidé lui-même. Occupant la cinquième place dans l’ordre de succession au trône britannique, derrière son père, son frère aîné, son neveu George et sa nièce Charlotte, il a peu de chance de régner. Pourtant, c’est le roi des cœurs des Anglais et le membre préféré du clan Windsor. Il est devenu le “prince du peuple” en mouillant la chemise (il fait ses courses au supermarché) et en serrant beaucoup de mains moins bien nées que lui, surtout celles de mamies et d’enfants. Lors de ses nombreux voyages (Afrique du Sud, Namibie, Tanzanie, Botswana), il a montré qu’il était un homme de terrain et non un dandy amateur de palais confinés, de corgis et de thé chaud. Le jeune homme a ainsi fait fondre beaucoup de déçus de la Couronne et gagné ses galons de gentleman. Même Michelle Obama le qualifie du titre de “prince charmant”.

Mariage punk

C’est d’ailleurs cet aspect tendre qui a séduit l’Américaine Meghan Markle, rencontrée grâce à un ami commun, et à qui Harry a offert une bague confectionnée à partir de diamants ayant appartenus à sa mère. L’actrice vue dans la série Suits cache derrière son brushing glamour et ses talons vertigineux une passion pour les bonnes œuvres. Féministe et engagée, elle a milité pour une association canadienne spécialisée dans le droit des enfants, pour l’égalité des genres au sein d’une entité de l’ONU, et soutenu la campagne HeForShe. Sauf que l’idylle de téléfilm à l’eau de rose entre deux fous d’humanitaire s’arrête là. Meghan a dû quitter son métier et supprimer ses profils sur les réseaux sociaux ainsi que son blog pour se plier aux règles archaïques de la monarchie. Par amour, elle a renoncé aux selfies et aux jeans déchirés ainsi qu’aux minijupes. Le protocole est strict. L’apprentie princesse s’est fait baptiser, doit suivre un entraînement anti-enlèvement auprès des forces spéciales, et apprendre à faire la révérence.

Mais on murmure qu’elle aurait beaucoup de mal avec l’étiquette, qu’elle a déjà enfreinte en menant la marche à la place de son futur mari lors d’une visite officielle à Nottingham, ou en croisant les jambes en public aux Invictus Games. Elle a aussi décidé de prendre la parole à son mariage, alors que c’est normalement un rôle dévolu à son père. Pourtant, malgré quelques courbettes, le mariage de Harry et Meghan reste un majeur tendu à la face de la royauté. En 1936, le roi Edward VIII, oncle d’Elizabeth II, fut contraint d’abdiquer pour épouser Wallis Simpson, américaine, roturière et divorcée. Meghan est roturière, catholique, divorcée et plus âgée (de trois ans) que son homme. Et elle n’est ni une Wasp, ni une princesse en détresse. Née d’une mère afro-américaine, elle raconte que sa mixité lui a fait rater des rôles  : “Je n’étais pas assez noire pour obtenir des rôles de Noires, et pas assez blanche pour des rôles de Blanches.” Épouser cette femme forte, libre et étrangère, c’est se rebeller contre des années d’un passé teinté de racisme et de colonialisme de la part de la monarchie anglaise. En disant oui à Meghan le 19 mai, William dira non à l’archaïsme, à la suprématie blanche, à la fermeture des esprits, au Brexit et aux jours gris. Un oui qui devrait redonner le sourire aux Anglais et rendre le royaume peut-être un peu plus uni. D’ailleurs, ce soir-là, les pubs sont autorisés à fermer plus tard pour permettre à tous, ensemble, de fêter ce choix digne d’un roi.

Mariage punk
Mug chez Emma Bridgewater.

Cet article est actuellement visible dans le numero de mai 2018 du magazine Jalouse 

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