Pop Culture

Sasha Spielberg : "Ce que je porte en dit long sur moi"

Au cinéma, on la connaît sous son propre nom, Sasha Spielberg, fille du réalisateur monumental. Sous le pseudo de Buzze Lee, cette Californienne sort un premier album intimiste, "Spoiled Love", avec la complicité de Nicolas Jaar. Rencontre à distance avec une brillante (en)chanteuse.
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Par une nuit de décembre glaciale, on se connecte sur Zoom pour un rendez-vous entre Paris et Los Angeles. Buzzy Lee, apparaît à l’écran. Un sourire rayonnant illumine son visage, au naturel, encadré par une chevelure brune ondoyante. Derrière elle, des fenêtres laissent deviner le soleil californien. Son accueil chaleureux réduit immédiatement en miettes la distance qui nous sépare. “En 2020, j’ai traversé des périodes difficiles, à cause d’une rupture et du décès de mon grand-père, commence-t-elle. Mais j’ai aussi j’ai pu prendre le temps, de cuisiner, de lire, de regarder plein de films que je n’avais jamais vus, de marcher, de méditer, de faire de l’aquarelle... J’ai compris que la solitude ne me dérangeait pas, et ça a été une leçon très importante pour moi.” Autre événement majeur : Sasha a fêté son 30e anniversaire, une journée qu’elle a passée “principalement à répondre à tous les messages”, regrette-t-elle, mais qui a inauguré une nouvelle décennie réjouissante. Déjà croisée au cinéma dans certains films de son père, la Californienne s’est aussi illustrée en musique avec son frère Theo (au sein du duo indie-folk Wardell) et avec son ami Nicolas Jaar (pour leur projet Just Friends).

Elle s’apprête à dévoiler fin janvier son premier album solo sous le pseudo de Buzzy Lee. “Le nom Spielberg était déjà pris, lâche-t-elle dans un éclat de rire. À l’origine, j’envisageais de sortir un EP en restant anonyme, mais c’était impossible si je voulais faire des concerts à visage découvert. J’ai juste envie que les gens découvrent ma musique sans idée préconçue, avant de lire ce nom de famille devant lequel je préfère parfois me dérober.” On comprend facilement cette envie de creuser son propre sillon et de se faire un prénom dans sa prestigieuse famille. De ses parents, le réalisateur Steven Spielberg et l’actrice Kate Capshaw, Sasha a hérité d’une passion pour la musique dès l’enfance. Elle nous confie que son père n’arrêtait pas d’écouter les Beatles et des musiques de films, tandis que sa mère passait en boucle des artistes comme Lucinda Williams, Ani DiFranco et toute la clique Lilith Fair des 90s. “Pour ma part, après une phase pop, j’ai commencé à jouer de la guitare à l’âge de 12 ans. C’est à ce moment-là que je me suis mise à adorer Led Zeppelin et le rock.”

Loin de ses obsessions d’ado, l’album Spoiled Love arbore des tonalités d’une beauté vertigineuse, apaisantes, minimalistes et intimistes. On pense aux arrangements verglacés du premier Lykke Li, à la voix de Zooey Deschanel chez She & Him, ou à la limpidité de Joni Mitchell. Derrière son synthé, la chanteuse compose ses chansons sur un ton direct. “J’aime les premiers jets. Mes paroles sont des phrases simples qui ressemblent beaucoup aux textes que j’écris dans mon journal intime. J’ai l’impression que plus les mots sont bruts et clairs, plus ils résonnent et expriment le fond de ma pensée.” Ces morceaux ont été façonnés avec l’artiste électro Nicolas Jaar, ami intime avec qui elle travaille depuis des années. Leur rencontre a eu lieu durant leur première année d’études à la prestigieuse université Brown. Ils avaient 18 ans et leur complicité est d’abord née d’un amour mutuel pour le groupe anglais Portishead. Sur Spoiled Love, ils élaborent ensemble des sonorités délicates, où le premier rôle est tenu par la voix de Sasha, ou plutôt deux pistes de voix superposées, façon John Lennon. “Nico m’apporte énormément. Il sait comment faire respirer une chanson, à petits coups de pinceaux. Il est capable de se changer en guide, voire en pom-pom girl quand j’en ai besoin, en coach aussi. Bref, il est incroyable !”

Si la musique est son mode d’expression favori, Sasha utilise également la mode pour affirmer sa personnalité. “Ce que je porte en dit long sur moi, en particulier en live. Beaucoup de styles m’inspirent, comme celui des années 1940, ou le style western. J’ai eu des périodes où je ne m’ habillais qu’avec les vêtements de mes petits amis, et j’adorais cette sensation de confort. D’ailleurs, il y a beaucoup d’artistes masculins dont j’admire les looks sur scène, David Bowie, Prince... Leur mélange de masculin et de fémin me fascine.” On pourrait en dire autant de son album d’une splendeur jamais ostentatoire, qui captive du début à la fin.

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