Pourquoi la mode est-elle obsédée par le passé ?
Les 4 et 5 mars derniers, en pleine fashion week, une foule de collectionneurs se presse dans un cinéma pornographique du 2e arrondissement parisien à la vente vintage Maison Margiela organisée par Byronesque, site de vente en ligne de pièces collector. Trois-cents modèles iconiques des années 1989 à 2009 sont réunis : ballerines “Tabi”, vestes sans manches composées de gants de cuir, pardessus en plastique, pièces en maille de Miss Deanna… “Les archives de la Maison Margiela influencent fortement la mode actuelle. Vetements et Demna Gvasalia ont favorisé cet engouement pour ses silhouettes. Ils ont comblé un manque qu’on avait tous et qui n’a fait qu’accroître l’envie de s’approprier l’original”, commente Gill Linton, fondatrice de Byronesque. En janvier, la marque unisexe française Avoc choisit la boutique vintage Kiliwatch pour présenter sa collection automne-hiver 2017/2018 ; deux mois plus tard, le créateur Neith Nyer organise son défilé dans la friperie Guerrisol. La vogue du vintage est telle que le mot est désormais sur-utilisé et désigne toute pièce un tant soit peu rétro : fripes, produits de luxe d’occasion, survêtements Adidas des années 1990, pièces rares des années 1940, vêtements chinés aux puces… Recherche de l’insolite, lassitude des productions sérielles des enseignes de fast fashion, nostalgie d’une qualité perdue, distinction par le décalage, avantages financiers, démarche responsable : les ressorts psychologiques de l’achat vintage sont complexes. Et les amateurs ont l’embarras du choix : friperies Kiloshop, Guerrisol, Free’P’Star, spécialistes du vintage de luxe Anouschka, Quidam de Revel, Didier Ludot, La Mode Vintage, Gauthier Borsarello, sites de vente de produits de luxe de seconde main Vestiaire Collective, Grailed, Collector Square… Cet engouement pour les vêtements d’hier révèle de nouvelles façons de consommer la mode et de la concevoir.