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Atxi, le luxe nouvelle génération

Prononcez « Atchi », et suivez bien cette jeune marque française, née il y a tout juste un an, dont les créations participent au nouveau souffle ambiant.

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Passé par l’incubateur entrepreneurs de l’IFM et un premier salon Tranoï, le fondateur d’Atxi, Guillaume Hiriart Carriat, 25 ans, a deux buts dans la vie : perpétuer une tradition familiale de trois générations et repenser une certaine idée du luxe. « Kasko », têtu en basque, le définit assez bien. 

Guillaume Hiriart Carriat, par MayaMaya

L’Officiel Hommes : Où, quand et comment est née la marque Atxi ? 

Guillaume Hiriart Carriat : Atxi est née au Pays Basque, plus précisément dans le village d’Espelette, dont je suis originaire. J’ai grandi là-bas jusqu’à mes 17 ans, avant de partir pour Bordeaux puis Montréal, où je suis resté six ans. J’ai appris à parler basque à l’école locale « Ikas-bi » en face de chez moi, à quelques pas de la tannerie familiale, une des dernières indépendantes en France, aujourd’hui dirigée par ma mère. La marque Atxi tire son nom du surnom que nous donnions enfants à mon grand-père, Jacques Carriat, qui avait lui-même donné son nom à une maison de maroquinerie lancée par ma grand-mère en 1971. Cinquante ans plus tard, j’ai décidé de relancer cette marque avec un vestiaire complet aux inspirations basques et contemporaines, sous un jour nouveau, mais fortement empreint des valeurs familiales. Avec l’idée de développer cet héritage et de perpétuer un artisanat local exceptionnel dont il reste encore aujourd’hui le bâtiment, les patrons, les machines… 

A l’heure où l’industrie textile est en pleine redistribution des cartes, quel est ton positionnement sur ce grand échiquier ? 

C’est un long travail, d’autant plus que je souhaite faire reposer ce positionnement sur un juste équilibre entre luxe et création. Une dualité qui comprend à la fois la prépondérance de l’accessoire, que je renouvelle chaque saison en « carry over », et une approche très couture pour le prêt-à-porter, qui sous-entend une remise en question artistique permanente. Je tiens à me laisser cet espace de « no-limit » créatif.  

Tu ne caches pas, tu revendiques même, ta volonté de faire d’Atxi l’outsider luxe d’une nouvelle génération de jeunes créateurs. Est-ce qu’il t’arrive de douter quant à ce choix hautement stratégique ? 

Evidemment que je doute, et c’est plutôt sain ! J’ai pris ma part de risque en misant sur la mise en avant du travail du cuir comme métier d’art, à une époque où il est décrié. Mais c’est aussi une position d’outsider qui me plait, parce que peu de jeunes maisons le font et qu’il y a selon moi ici une grande zone d’ombre, et donc une place à prendre. Je suis intimement convaincu qu’une marque peut aujourd’hui être contemporaine tout en utilisant le savoir-faire d’antan et le Made In France, tout en ajustant son business-développement aux stratégies du moment… Inventer le luxe de demain, prendre le temps d’y éduquer les jeunes générations, avec une stratégie d’entreprise à 8-10 ans, ne me fait pas peur.

As-tu conscience d’aller ainsi à contre-courant d’un contexte économique actuel non seulement fragile, mais aussi fortement lié aux notions de décélération ?

Oui et non. Peut-être est-ce la perception que les gens en ont, mais Atxi est bien de son époque, notamment sur le sujet de la mode responsable : j’utilise des techniques ancestrales d’ateliers, avec des matières naturelles, en revalorisant des stocks existants (comme ceux de Nona Source), en circuit court Made In France. Je ne le mets pas systématiquement en avant, car pour moi c’est induit.

Où et comment souhaites-tu idéalement emmener Atxi dans les années qui viennent ? 

Mon rêve ultime serait de pouvoir monter une unité maroquinerie en propre, au Pays Basque. Le risque financier est monumental et la route sera longue, mais cela nous permettrait d’assurer un contrôle et une transparence de production. En attendant, un premier pop-up l’été prochain sur mes terres, à Biarritz, semble être un rêve accessible !

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Collection printemps-été 2022, par Rayan Nohra

Tu es un fervent défenseur, un militant même, du Made In France. Est-ce finalement moins compliqué qu’il n’y parait, et quels en sont les intérêts ? 

Je suis de ceux qui pensent que c’est plus facile ! A condition que l’on soit soutenu financièrement sur le terrain. Le Made In France, c’est une autoroute ! Avec son savoir-faire, ses interlocuteurs, sa proximité, sa réactivité, sa bonne conscience aussi. C’est un gage de crédibilité et de qualité sans égal. Relancer et revaloriser ces unités de production est un grand défi, mais qui en vaut la peine. 

Avec combien de fournisseurs travailles-tu ?

Une petite dizaine au total d’ici la fin de l’année, parfois juste pour un modèle dans trois couleurs ! Tous en France, à Paris pour la confection, en province pour le tricot, la maroquinerie, les espadrilles et chaussures (tous dans le Sud-Ouest), et la soierie à Lyon. Seuls mes bérets sont faits à Pampelune ! 

Les aides et soutiens financiers au développement français de la marque suivent-ils derrière ? 

Concernant les aides publiques, on sent une vraie dynamique à soutenir les industries créative et culturelle en France. Mais le grand écart entre Paris et la province demeure. Atxi étant immatriculée à Espelette, la marque est affiliée à la région nouvelle Aquitaine et les process sont longs, ils connaissent moins bien le secteur mode luxe. Quant aux aides privées, elles concernent encore beaucoup trop la tech, alors que l’industrie de la mode fait partie du rayonnement de la France à l’international.

On te sait facilement revendicateur, voire râleur. Qu’est-ce qui te rend dingue ?

Le lobby des matières alternatives au cuir, qui prend vraiment les consommateurs pour des cons ! Les dits "cuirs vegan" (appellation interdite en france), à base de plastique dans lesquels on glisse un peu de cellulose, c’est une fumisterie, à part peut-être le mycelium. Leurs transparence et durabilité sont plus que discutable, avec des procédés de fabrication à base de pétrole, sans parler de leur stratégie marketing qui consiste à systématiquement diaboliser le cuir. Mais au final, à moyen terme, ça nous servira.

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Etxea Eguskia, "it bag" de la maison, par Rayan Nohra

Comment définir le style Atxi ?  

« L’extravagance d’une vie simple », phrase manifeste de la maison, dont l’oxymore résume parfaitement le style Atxi. La rencontre entre mode et lifestyle, que le Pays Basque a toujours su cultiver, dans ses paysages, son art de vivre… Entre « Gatsby basque » et vêtement de berger. Je m’inspire beaucoup des photos d’archives laissées par mes grand-parents, avec cette image forte du couple, pour des collections mixtes et des pièces qui vivent, raffinées mais jamais aseptisées. J’aime cette provocation, et ma troisième collection ira un peu plus loin en ce sens.

Où puises-tu ton inspiration ? 

Je n’ai pas de passé mode, je suis un instinctif, mais il est certain que mon long séjour outre-atlantique a été marqué par le travail de designers américains comme Teddy Santis de Aimé Leon Dore ou Ronnie Fieg de KITH. De retour en France mon passage chez Louis Vuitton au studio de Virgil Abloh a fini de forger mon style. Et puis il y a l’influence d’un Cristobal Balenciaga, époque San Sebastian, évidemment. 

atxi.fr

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Photo Rayan Nohra

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