Industry Trends

Benetton revient sur le devant de la scène

Benetton revient sur le devant de la scène avec son fondateur Luciano Benetton, son photographe culte Oliviero Toscani et son nouveau directeur artistique Jean-Charles de Castelbajac, que l’on a rencontré.
person human art painting

Pouvez-vous nous raconter votre premier souvenir avec la marque et son fondateur ?
Le panache de Luciano Benetton... Il avait accepté de poser dans un de mes pulls pour Iceberg, devant l’objectif d’Oliviero Toscani en 1982, alors que nous étions concurrents.

Comment cette collaboration avec la marque italienne est-elle née ?
Luciano Benetton est revenu aux commandes de sa marque il y a deux ans. Il a appelé Oliviero Toscani, son complice de toujours, qui m’a appelé à son tour. Dès que j’ai visité ces incroyables ateliers, j’ai dit oui. Le défi m’a semblé pas- sionnant.

Vous avez collaboré par le passé avec le photographe Oliviero Toscani, à qui l’on doit les campagnes cultes de Benetton. Parlez-nous de vos retrou- vailles et des images que vous aller concevoir ensemble...
Avec Oliviero, notre saga a commencé en provoquant un scandale au début des années 70 avec Jésus Jeans. Cela a continué dans les années 80 avec Iceberg et Warhol, Moschino, Ettore Sottsass, et maintenant Benetton. Toujours des images impactantes. Aujourd’hui, peut-être plus qu’hier, notre objectif est de parler du produit. Nous devons donner envie à toute une génération de franchir la porte de nos magasins, et envahir l’océan digital de nos images manifestes.

Avec Benetton vous signez votre retour à Milan, cette ville vous a-t-elle manqué ?
L’Italie me manquait, cette dimension magique qu’ont les industriels vision- naires de comprendre que la création est un moteur essentiel. Quant à Milan, nous ne voulons pas y prendre l’habitude de défiler mais plutôt de l’investir d’une manière décalée.

Quand on pense à votre travail – l’utilisation des couleurs, la mode comme moyen d’expression et miroir de la société, voire comme forme d’art –, on pense aussi à l’ADN de Benetton. Vos valeurs sont-elles communes ?
Beaucoup d’éléments nous lient: la passion pour la maille, les couleurs pri- maires, l’ironie, ne pas se prendre au sérieux, les vêtements intemporels et ce souci de qualité. Aujourd’hui, nous partageons une vision et un projet com- mun. Propager un style, de la beauté démocratique, du cool pour tous. Après tant d’années à développer l’art et la mode, à investir des territoires expérimentaux pour démythifier le vêtement, nous nous rejoignons en considérant que le plus important, aujourd’hui, est de renouer avec la dimension sociale et populaire de Benetton, et de mettre fin à la frustration d’une clientèle qui a envie de beau mais qui ne peut se l’offrir. C’est désormais pos- sible chez Benetton.

Quels sont vos défis à venir chez Benetton ?
Continuer à développer une mode responsable, écologique, ramener la pro- duction vers le bassin méditerranéen, loin de la Chine, utiliser des teintures minérales et créer une mode sans frontières, sans âge, inspirée par l’ADN historique de Benetton. Faire des collaborations inattendues, un festival alternatif avec la Fabrica. Quant à Luciano, il vient de créer un nouveau con- cept de boutique et envisage d’en ouvrir plusieurs dizaines l’année prochaine. Benetton is back.

Cette collection a-t-elle une muse, et si oui, laquelle et pourquoi ?
La muse de cette collection, c’est l’histoire même de Benetton, c’est sa légende, sa dimension iconique et sa géniale communication créée par Toscani.

Le tricot a longtemps été la signature de la marque, l’est-il encore ?
En 1964, Luciano Benetton a créé son premier petit pull de couleur jaune; aujourd’hui c’est un arc-en-ciel qui réveille cet élément historique. Ma pre- mière collection, Rainbow Machine, est inspirée par cette tradition de maille réinventée. En 1981, j’ai créé chez Iceberg le premier pull Snoopy, qui était par son prix inaccessible... Je suis donc fier aujourd’hui de l’avoir magnifiquement réinventé à moins de 100 euros et en 100 % laine. La maille est notre cheval de bataille, et la sœur de Luciano, Giuliana, en dirige les ateliers avec brio.

Quelles sont les inspirations de cette première collection ?
Un retour aux origines de la maille, grand étendard de Benetton, réinventée et revitaminée dans ses couleurs. Également le jean, pierre angulaire historique. On désire aussi redynamiser les lignes homme et enfant. Remettre en avant les deux merveilleux logos historiques : la bannière verte et le “punto maglia”. J’avais envie d’un tribalisme urbain mâtiné de hip-hop et de streetwear, aux couleurs primaires. J’ai fait appel pour le stylisme du défilé à Celestine Cooney qui est venue en renfort et en magique décalage.

1 / 5
Un personnage de bande-dessinée ? Définitivement Linus, des Peanuts. J’aiime son humour, sa conscience écologique, son élégance, sa jeunesse éternelle et son sens de l’amitié.
Si votre collection était un film ? Rainbow Machine, il raconterait l’histoire de trois amis: Luciano, Oliviero et Jean-Charles qui reviennent vingt ans après pour faire le hold-up d’une banque de couleurs sur une bande-son de Michel Gaubert.
Un livre ? La laideur se vend mal, de Raymond Loewy. Une femme ? La mienne, Pauline de Drouas, qui est à ma droite. Elle est ma chef de projet au quotidien dans cette aventure. Mais aussi toutes les femmes pour lesquelles je dessine. Une couleur ? Celle des vitrines de nos 4 000 magasins à l’arrivée de notre première collection.
Un album ? Incidental Music, de W.H. Lung (ci-dessus), et Arco Iris, de Flavien Berger.
Une ville ? Trévise, où sont basées nos usines construites par des architectes extraordi- naires, Ando pour la Fabrica et Scarpa pour Benetton.

Recommandé pour vous