Quels mystères se cachent dans les nouveaux joyaux Van Cleef & Arpels?
La grammaire stylistique de Van Cleef & Arpels s’articule autour de thèmes et de figures très reconnaissables. Les collectionneurs et les amateurs de bijoux d’exception savent que cette très grande maison de joaillerie française privilégie dans ses collections les thèmes de la nature (avec une prédilection marquée pour les fleurs et les oiseaux), de la féerie, de la danse, de l’amour, de la chance (ah, le fameux “Alhambra” !) ou de la haute couture – le collier “Zip” est certainement le bijou le plus iconique de la maison mais aussi de la place Vendôme. Quant aux pierres précieuses, elles doivent toutes se signaler – en complément des habituels critères d’excellence en vigueur – par une caractéristique supplémentaire, aussi déterminante qu’impalpable : le caractère. Chose étonnante, malgré le côté systématique des qualités privilégiées et des thèmes développés, année après année, par le joaillier, peu de maisons, voire aucune, ne sont à ce point capables de nous confondre de surprise et d’admiration au fil de collections où l’érudition est systématiquement teintée de bienveillance.
Des talismans personnels
Nous avons essayé de comprendre les raisons de cette émotion sans cesse renouvelée et nous en sommes arrivé à la conclusion suivante : l’art est le complément de la vie. Non pas son imitation grandiose ou sa reproduction parfaite, mais son complément. L’art nous émeut, dit-on, lorsqu’il remue en nous une corde sensible. C’est précisément là que réside le génie de Van Cleef & Arpels : nous sommes tous une harpe à mille cordes, et la force de l’habitude, c’est à-dire la monotone musique quotidienne, n’en utilise que quelques-unes, et toujours les mêmes. Nous sommes donc reconnaissants lorsqu’une création réussit, par sa délicatesse, sa poésie, sa virtuosité, à toucher l’une des cordes, et peut-être des plus fortement tendues, restées dans l’ombre, afin de nous permettre de compléter notre symphonie. Cette explication personnelle, Nicolas Bos, PDG de la maison, la traduit ainsi : “Nous cherchons une dimension poétique dans nos créations. L’objectif premier n’est pas la performance mais de donner vie à une histoire, à une émotion.” La complexité technique mise en œuvre dans la nouvelle collection de haute joaillerie Van Cleef & Arpels, “Le Secret”, dédiée au mystère sous toutes ses formes, est à proprement parler miraculeuse. Inscrite dans la tradition ancestrale du bijou à double lecture, elle réinvente ces talismans personnels peuplés de messages cachés, de chemins labyrinthiques, de rébus à déchiffrer, de métamorphoses inattendues. Mais, comme à son habitude, même si on ne peut qu’imaginer les trésors d’ingéniosité, de précision et de patience nécessaires pour mettre au point ces joyaux dont la manipulation est fluide et aisée, la maison française tait ses efforts pour ne laisser place qu’à l’étonnement et à l’inattendu.
Prodiges et trésors
Ainsi, la partie supérieure d’une bague “Fleur bleue”, composée d’un remarquable saphir birman de 5,13 carats auréolé d’émeraudes, de tourmalines dites Paraiba et de diamants, pivote et se soulève (il faudra pour cela deviner le mécanisme) afin de révéler une citation d’Oscar Wilde gravée dans l’or. Autour d’un cœur de spinelles roses et orange, les pétales en diamants du clip “Marguerite d’amour” se retournent pour mieux égrener ces messages qui ont tous piqueté nos tendres années : “Passionnément”, “À la folie” ; le “un peu” et le “pas du tout” ont laissé place – bienveillance oblige – aux onctueux adverbes “Tendrement” et “Infiniment”. Autre exemple – il y en a tant d’autres –, le clip “Sous son aile” offre au regard un perroquet protégeant son petit : intégré avec soin à la pièce, le système d’ouverture de l’aile permet de découvrir l’oisillon blotti contre sa mère, dans une douce harmonie de saphirs roses, de corail et de diamants. Difficile néanmoins de ne pas être saisi devant les prodiges techniques et les trésors de précision qui s’épanouissent au gré d’un mécanisme d’une grande sophistication ou d’une transformation insoupçonnable : un bracelet “Dentelle secrète” change de couleur et de visage grâce à un système de volets en nacre qui viennent se substituer aux plaques d’onyx initialement visibles dans les parties ajourées, la bague “Séraphîta”, inspirée de l’œuvre éponyme d’Honoré de Balzac, renferme plusieurs joyaux puisqu’elle peut accueillir deux anneaux différents en son centre, l’un serti d’un saphir de 16,46 carats, l’autre de diamants et de saphirs mauves. Ayant nécessité plus de 2 200 heures au sein des ateliers de la place Vendôme, le collier “Pégase” réunit les savoir-faire les plus accomplis de la haute joaillerie : la pampille centrale de ce collier transformable – qui met à l’honneur un saphir du Sri Lanka de 45,10 carats dont le bleu royal est typique des mines anciennes – dissimule une figurine miniature en or blanc représentant le cheval ailé. Jacques Arpels disait : “Pour avoir de la chance, il faut croire à la chance.” Chacune des cent pièces qui composent cette collection recèle un coup d’éclat dont le plus grand mérite est cette volonté, rendue possible grâce au travail des artisans aux mains d’or, de réenchanter l’existence et de redonner envie de croire à la magie et au merveilleux.