Faut-il voir se réjouir du retour de The Morning Show ?
Après une première saison contrastée, The Morning Show revient, toujours avec Jennifer Aniston et Reese Witherspoon, mais rebattant ses cartes. Assez pour nous retenir ?
A dire vrai, l’on ne savait pas trop quoi penser de cette création-phare de la plateforme Apple TV+ : ni ratée - sa distribution de rêve donnant toute sa valeur à la série -, ni totalement emballante. Elle avait au moins le mérite d’épouser les contours de l’actualité, le mouvement #metoo, et de dépeindre assez finement les dynamiques entre les personnages sans toutefois atteindre les sommets des œuvres d’Aaron Sorkin (Sports Night, The West Wing), incontournables références en matière de séries où les mots alimentent le moteur de la narration, sont l'essence même du projet. Manquant un peu de nervosité, d’acidité, aussi, elle paraissait un peu amorphe, quand son sujet devait à l’inverse l’électriser.
On avait quitté Alex (Jennifer Aniston) et Bradley (Reese Witherspoon) au terme du meilleur épisode de la saison, faisant joyeusement exploser la mécanique d’une chaîne de télévision tentant de se racheter à bon compte une conscience socio-politique. On retrouve, neuf mois plus tard, une Amérique déchirée par la présidence de Donald Trump, guettant d’un œil encore perplexe l’arrivée d’une certaine pandémie…L’on peut reprocher quelques maladresses narratives ou un didactisme un peu empesé, à la série, mais certainement pas sa prudence ou sa timidité - elle embrasse d’un seul geste les questions de l’identité sexuelle, de l’appartenance communautaire, des ambitions et vanités personnelles, des emballements afférents, des vertiges amoureux, des failles du politiquement correct…L'arrivée de nouveaux personnages et la mise en lumière plus attentive des seconds rôles donnent une nouvelle énergie au Morning Show. En revanche, les digressions suivant en Italie le banni Mitch (Steve Carell, un peu éteint cette saison), sont quasiment irregardables tant elles sont empesées, alourdies par des clichés que même une publicité des années 80 pour le café n’aurait pas osé enchaîner. Capable de ménager des brèches émouvantes dans un récit parfois trop calibré, portée par un casting chromé - d’Aniston à Witherspoon, en passant le magnétique Billy Crudup (une merveille d’acteur, tout en nuances mélancoliques, touches délicates, s’il avait été un pianiste de jazz, disons qu’il aurait été Bill Evans) - cette nouvelle saison gomme certaines paresses de la précédente, sans toutefois exprimer son potentiel, n’osant jamais, tout à fait, franchir la barrière de la brutalité - elle a beau se confronter à la cruauté du monde contemporain, son enveloppe reste bien trop lisse pour tout à fait séduire. On aimerait plus de folie, de lâcher prise, de rythme aussi et surtout d’aspérités auxquelles s’accrocher pour s’y attacher.
The Morning Show. Une série créée par Michael Ellenberg et Kerry Ehrin. Avec Jennifer Aniston, Reese Witherspoon, Steve Carell et Billy Crudup. Disponible sur Apple TV+ à partir du 17 septembre.
