Venise : la vie de palais selon Aman
Comme la Belle après un long sommeil, la Sérénissime a retrouvé ses couleurs. Cap à l’hôtel Aman, sis dans le palais Papadopoli, pour (re)découvrir quelques trésors de la cité des Doges.
Que ce soit dans un désert américain, sur un pic bhoutanais ou au cœur d’une mégapole japonaise, séjourner dans un hôtel Aman, c’est toujours faire l’expérience d’un moment exclusif. Et dans cet art inégalé de se fondre dans le paysage pour mieux en ressentir toute sa densité, Aman a atteint à Venise un sommet de virtuosité. L’entreprise était délicate : s’installer dans un palais du XVIe siècle classé des sols aux plafonds, où dialoguent en continu la magnificence, l’opulence et la grandiloquence, requérait un certain sens de la modestie, demandait de composer non pas avec la force de la nature mais avec celle de l’Histoire et des arts.
Rompu à l’exercice, le cabinet d’architecture Denniston (Jean-Michel Gathy) a parfaitement réuni passé et présent. À travers un aménagement sobre des chambres et des parties communes, il laisse éclater tous les trésors du palazzo Papadopoli sans craindre le syndrome de Stendhal. Résultat : on se retrouve projeté dans une Venise rêvée et pourtant bien réelle, comme cette lumière dorée du soir qui fait étinceler les palais bordant le Grand Canal.
À dormir debout
Situé dans le quartier de San Polo, tout proche du pont du Rialto, ce palais est encore habité par ses propriétaires, le comte Giberto Arrivabene Valenti Gonzaga (descendant des Papadopoli), son épouse la comtesse Bianca de Savoie-Aoste et leurs enfants. Si la famille est ici chez elle, allant et venant dans les étages ou le jardin, toute disposée à échanger avec les hôtes, elle n’occupe que le vaste dernier étage, le reste de l’édifice, soit 7000 mètres carrés, étant dévolu à l’hôtel. Construit vers 1560, le palais a d’abord été la propriété de la famille Coccina, riches commerçants et marins – d’où la présence des deux obélisques surmontant le toit, en référence à l’amiral Coccina. Au XVIIIe siècle, la famille Tiepolo rachète le palais et commande toute une série d’œuvres d’art, comme les fresques de Giambattista Tiepolo ou encore des statues de marbre d’Antonio Canova. En 1864, les frères Papadopoli, originaires de Grèce (et déjà propriétaires du palazzo Grassi) acquièrent le palais mais également les bâtiments le jouxtant, et aménagent ainsi un jardin sur le Grand Canal. Agrandi, rénové et redécoré, le palais Papadopoli entame alors une nouvelle vie. Il devient un lieu de confort – on y installe un des premiers ascenseurs de Venise ainsi que des lustres électriques – et de divertissement pour toute la haute société vénitienne. Aujourd’hui, le comte et la comtesse continuent, à travers Aman, ce grand œuvre de préservation patrimoniale et perpétuent cette tradition d’accueil chaleureux et de plaisir d’esthètes qui ravissent les hôtes du monde entier.
Côté chambres, les 24 clés, toutes différentes, ont des vues spectaculaires, soit sur le Grand Canal soit sur le jardin. Beaucoup d’entre elles possèdent de merveilleux éléments architecturaux ou décoratifs – plafonds à caissons, fresques, boiseries, bas-reliefs, sol en marbre terrazzo, murs tendus de soie ou de cuir de Padoue, etc. –, voire des chefs-d’œuvre comme la cheminée en pierre du XVIe siècle signée Sansovino ou le plafond peint par Tiepolo au XVIIIe siècle (dans la suite Alcova Tiepolo, le nid nuptial de George et Amal Clooney).
Artisans d’art
À l’heure du repas, l’excellence se retrouve aussi à la table de l’Aman Venise. Depuis janvier 2020, c’est le chef Norbert Niederkofler (trois étoiles Michelin) qui orchestre la cuisine de l’hôtel avec le jeune et talentueux chef exécutif Dario Ossola. À eux deux, ils mettent en pratique leur philosophie culinaire “Cook the lagoon” en travaillant des produits provenant de la lagune et des potagers des îles alentour. Il faut aller faire le marché du Rialto avec Dario, dévorer des yeux les étals aux poissons, la palette de couleurs des légumes de saison, et savourer l’ambiance de ce petit “ventre de Venise”, avant de revenir cuisiner avec le chef ce que son œil d’expert aura sélectionné juste pour vous. Un pur plaisir !
Puis on continuera de dérouler le fil (d’or) des expériences proposées par Aman, comme la visite absolument merveilleuse de la très ancienne manufacture Luigi Bevilacqua, dans le quartier de Santa Croce, tissant à la main encore aujourd’hui les plus précieux tissus pour l’ameublement et la haute couture : velours soprarizzo, damas, lampas et brocarts, sont fabriqués dans le vacarme des métiers à tisser en bois datant du XVIIIe siècle par une dizaine d’ouvrières longuement formées. 3500 patrons constituent les archives de l’illustre maison qui fournit, à son rythme artisanal, les plus prestigieux clients du monde, de la Maison Blanche à Christian Dior, du Kremlin aux plus belles églises de Venise.
Enfin, à Cannaregio, c’est l’atelier Orsoni qui vous ouvrira ses portes. De ce tout dernier fourneau de la cité sort la plus belle mosaïque depuis 1888, notamment la mosaïque de feuille d’or 24 carats ainsi que des émaux dans plus de 3500 nuances de couleur. Le monde entier est parsemé de ces petites tesselles qui ornent aussi bien la basilique de la place San Marco à Venise que la Sagrada Familia à Barcelone, le tapis funéraire de Rudolf Noureev que l’Opéra et le Sacré-Cœur de Paris, le mausolée d’Atatürk que la cathédrale de Westminster…
Une profusion de savoir-faire, de richesses et de beautés qu’on aime à se remémorer le soir au bar de l’hôtel, à l’heure du cocktail signature. Imaginé par le comte, Lustful, c’est son nom, est à base de gin et de vermouth extra-sec et est auréolé d’une feuille d’or qui s’imprime sur les lèvres. Une expérience, sans prix !
Avec Exclusif Voyages, à partir de 3 480 € par personne, incluant : les vols A/R Paris/Venise en classe économique sur Air France, les transferts A/R en bateau privé aéroport/hôtel, 3 nuits en Palazzo Bedroom à l’hôtel Aman Venise, les petits déjeuners, le minibar. www.exclusifvoyages.com