Food

À Seoul avec Yannick Alleno

Dans le dernier numéro de L'Officiel Voyage, nos invités nous racontent leur dernière escapade à l’étranger et nous donnent leurs meilleures adresses. Deuxième volet avec Yannick Alleno.
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Votre profession de chef vous amène-t-elle à vous éloigner fréquemment de vos fourneaux ?

Je suis cuisinier : dès que je quitte un fourneau c’est pour en retrouver un autre ailleurs. Je ne suis jamais loin de mes cuisines, même en vacances !

 

Vous rentrez d'Asie. Pour quelle raison êtes-vous parti et dans quelles conditions ?

Nous étions partis ouvrir un restaurant TERROIR PARISIEN à Hong Kong. C’était notre première ouverture à l’étranger pour ce concept de bistrot convivial et locavore et nous sommes déjà très heureux des retours. Nous en avions ouvert deux à Paris en 2012 et 2013 et avons un projet, parisien toujours, pour mars 2018 ! 

J’aime beaucoup l’Asie et m’y rends régulièrement ; en avril dernier, nous avons ouvert un restaurant moderne STAY à Séoul et repartons, début novembre, inaugurer un deuxième TERROIR PARISIEN à Shanghai. Ces ouvertures sont des projets très excitants parce que nous les préparons très en amont, notamment en repérant les meilleures localisations. Cela nous oblige à bien connaître les villes et leurs quartiers. Et puis j’aime découvrir, au gré des rencontres, de nouveaux lieux, de nouveaux goûts, des petits restaurants typiques, et en apprendre plus sur les cultures qui nous accueillent. C’est très important pour moi d’aller au contact de nos équipes ; elles me font découvrir leurs endroits préférés, nous prenons le temps d’échanger sur leurs idées de plats, nous faisons des tests, et puis j’en profite pour visiter mes amis chefs !


Est-ce que la gastronomie est pour vous un moyen d’approcher des cultures étrangères ?

La France est au carrefour de l’Europe et du monde, c’est ainsi que notre cuisine a toujours su se nourrir des cultures étrangères. Il m’a fallu voyager beaucoup pour comprendre cela ; ce sont ces nombreux déplacements qui m’ont fait évoluer et m’ont inspiré. Je suis très curieux. Je me souviens de mon premier voyage au Japon, j’étais très jeune, c’était fabuleux. J’y ai compris l’importance de gouter bien sûr mais aussi de regarder, de faire attention aux gestes. Du Maroc, je retiens le bon sens gastronomique des anciens. Tous ces principes observés, je me les applique depuis lors. Je pense qu’en scrutant les différentes approches, en prenant soin de poser les bonnes questions et en regardant attentivement la manière dont se partage un repas, on peut obtenir une bonne vision globale de la culture qui est derrière un lieu.

 

 Certains pays ont-ils modifié votre façon de concevoir la cuisine ? Votre approche des produits ?

Le Maroc a été une révélation. Je m’y suis intéressé pour construire les cartes de La Grande Table Marocaine au Royal Mansour à Marrakech. Il fallait que nous soyons à la hauteur alors je suis parti sillonner les provinces marocaines pour comprendre l’ADN de leur cuisine. Cela a réellement renforcé ma notion de respect des ressources par l’économie, l’utilisation globale d’un produit, la réutilisation ou la conservation ; récolter un produit en pleine saison et le faire sécher pour en bénéficier à un autre moment, réhydrater un légume avec une eau qui a déjà servi à une cuisson sont des réflexes de bon sens gastronomique que nous avons réintroduits dans tous nos restaurants. Quant à leurs cuissons, elles sont fabuleuses… et être cuisinier, c’est maitriser le feu. Je me suis beaucoup inspiré des techniques douces, à l’étouffée, qui confisent et des cuissons plus tribales comme le feu et la braise.

Mes voyages en Asie, et en Corée notamment, m’ont - eux - fasciné par la maitrise que ces pays ont de la fermentation. Nous y travaillons depuis maintenant 3 ans et c’est un procédé extrêmement intéressant qui apporte une vraie énergie aux plats et qui offre, outre les possibilités de conservation des aliments, une nouvelle gastronomisation du terroir.


Quel pays vous a le plus marqué (séduit) par son art culinaire ?

Je citerais une fois de plus le Maroc, pour les couleurs de sa gastronomie et surtout pour sa recherche permanente de l'équilibre des saveurs dans le plus petit détail. Je suis impressionné par toutes leurs techniques ancestrales que des hommes et des femmes ont farouchement gardées intactes sur des générations et suis stupéfait par la variété d'épices et d’herbes qui sont à notre disposition. 

 

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Qu’est-ce qui vous plaît le plus quand vous êtes en voyage ?

En voyage, je partage mon temps entre nos cuisines (beaucoup…), les marchés, pour découvrir de nouvelles saveurs et goûter la gastronomie populaire, et les galeries d’art. Si la gastronomie est un bon moyen d’approcher les cultures étrangères, je pense que l’art l’est autant. J’aime aussi rendre visite aux chefs locaux, échanger sur leurs techniques, leurs habitudes, c’est le meilleur moyen pour remettre en question son travail, l’aborder sous un nouvel angle.

 

A l’étranger vous avez tendance à vous laisser guider ou vous êtes du genre à partir seul à la découverte de nouvelles adresses ?

J’aime assez partir à la découverte, mais je recherche aussi volontiers la compagnie de mes confrères et collaborateurs. Ce sont de vrais moments de partage pour moi, hors du Pavillon Ledoyen, et je prends grand plaisir à les suivre. L’avantage de notre métier est d’avoir un ami qui vous attend dans chaque ville du monde (ou presque !). 

 

Votre prochaine destination ? 

Shanghai ! Nous sommes sur le point d’ouvrir un nouveau TERROIR PARISIEN dans la capitale chinoise, sous les arcades d’une ancienne abbaye. Le lieu est plein de charme, et l’on y retrouvera, comme à Paris, une atmosphère sympathique, des plats généreux construits à partir de beaux produits et des recettes d’Île-de-France. Mais finalement, je donne l’impression de beaucoup voyager alors qu’en réalité je suis l’essentiel du temps dans mon restaurant parisien, au Pavillon Ledoyen. Rien ne me plait plus que d’être derrière mes fourneaux, midi et soir !

Carnet d'adresses

Les marchés de Busan (quartier de Séoul)

Aller au marché est une de mes activités favorites. J’y aime tout, la convivialité, les couleurs, les odeurs, les gens… c’est une incroyable source d’inspiration. Nous avons un métier de passion qui repose essentiellement sur la transmission et le partage ; c’est toujours très sympa de se retrouver face à un autre passionné qui prend plaisir à nous expliquer ses méthodes de récolte ou de production. Busan est le quartier phare des marchés, si je passe à Séoul, je vais forcement y faire un tour avec mes équipes. 

Jalgachi Market 52 Jagalchihaean-ro, Jung-gu, Busan, South Korea
Haeundae Market 1394-193 Jung 1(il)-dong, Haeundae-gu, Busan, South Korea

 

Ara Art Center et l’expo Banksy

Je suis fou d’art contemporain. Où que j’aille, cela prend l’essentiel de mon temps libre. Il y a toujours de belles expositions. Récemment, celle de Banksy était très bien faite.
26 Insadong 9-gil, Gyeonji-dong, Jongno-gu, Seoul

 

National Museum of Modern and Contemporary Art Seoul

Le bâtiment est très impressionnant,  très moderne, carré et les salles sont immenses. On peut y mettre des installations monumentales et tous les arts comme tous les grands artistes modernes et contemporains y sont représentés. Entre la collection permanente et les différentes expositions, je pourrais y passer des heures.

Jongno-gu, Seoul


Restaurant Mingles (1 étoile)

C’est le restaurant étoilé de Mingoo Kang, un jeune chef coréen extrêmement talentueux qui a beaucoup voyagé et que j’ai rencontré il y a deux ans à New York à l’occasion des World’s 50 Best Talks. J’avais beaucoup aimé son intervention sur la fermentation. C’est aujourd’hui le 15e meilleur restaurant d’Asie et ses prix sont très corrects.

757 Seolleung-ro, Nonhyeon 2(i)-dong 
Gangnam-gu, Seoul


Le marché au fleurs

Je suis toujours admiratif de la beauté des fleurs et plus généralement de la nature. Les fleurs, comme un bon repas, font toujours plaisir, j’en achète très souvent pour le restaurant.

Yangjae Flower Market
Seocho-gu, Yangjae 2(i)-dong, 27. Seoul


Restaurant Bills de Jamsil pour une salade

C’est une cantine agréable, parfaite pour un brunch ou une salade. Les plats sont simples et on y retrouve l’esprit décontracté et amical australien. Le restaurant est situé dans la Lotte World Tower où nous avons installé notre restaurant moderne STAY au 81e étage.

Bills Jamsil
Songpa-gu, Seoul


Un Temple bouddhiste en pleine forêt

C’est tout le charme de Seoul, on passe de la mégalopole au dépaysement total en une poignée de secondes. Certains temples sont au cœur de la ville d’autres à quelques kilomètres en pleine foret. Je n’en ai pas visité beaucoup mais ils me fascinent toujours.


Un Restaurant de fermentation en pleine forêt

C’est une expérience hors du commun mais il faut avoir l’esprit aventurier parce que l’on y trouve des goûts qui sont loin de nous être familiers… Avoir la possibilité de déguster des haricots qui ont fermenté plus de 30 ans est simplement fabuleux. Nous oublions trop souvent, dans notre monde instantané, de penser aux générations futures. Je suis tellement reconnaissant que des hommes et des femmes aient mis en amphores des produits en imaginant que possiblement d’autres les mangeraient plusieurs décennies plus tard.

 

Restaurant Jungsik 

C’est la nouvelle cuisine coréenne portée par Jungsik Yim, un excellent restaurant une étoile au guide Michelin. Pour la petite histoire, le chef a également un restaurant à New York qui lui en possède deux. Aux commandes de la patisserie, vous y retrouverez Eun-ji LEE, une jeune fille brillante qui travaillait à nos côtés avec Cédric Grolet au Meurice.

11 Seolleungro,
158 Gil Gangnam-gu, Seoul

 

Les barbecues

Les barbecues sont incontournables. C’est le restaurant coréen par excellence et j’adore leur esprit ; c’est le partage absolu, tout le monde est autour d’une table avec de la braise au centre et on y fait griller soi-même des morceaux de bœuf coréen Han Woo. C’est une cuisine tribale assez diététique finalement, on y trouve en accompagnements toutes sortes de légumes fermentés, kimchi, pickles… et leurs sauces sont folles.
 

Lotte World Tower

C’est la 5e tour la plus haute du monde : 555m, on ne voit qu’elle en arrivant à Séoul. Elle est située dans le quartier très moderne de Gangnam et c'est la représentation parfaite du mall comme on ne le connaît qu’aux émirats ou en Asie : une ville à elle seule, avec un observatoire, un parc d’attraction, les plus belles boutiques et les meilleurs restaurants. Nous y avons le nôtre depuis quelques mois avec une cuisine fine et moderne, typiquement française. La vue y est incroyable, depuis la salle comme depuis les cuisines, toute la ville s’offre à nous et quand le nuit tombe, cela devient complètement magique.

Lotte World Tower 81F - 300, Olympic-ro, Sincheon-dong
Songpa-gu - Seoul, 05551

 

Hotel Signiel Seoul

C’est l’hôtel de la Lotte World Tower, du 76e au 101e étage, les chambres sont superbes. Mention pour le Sky Bar pour un bon verre de vin ou un cocktail en toute fin de soirée ou pour un apéritif avec quelques snacks avant de filer diner.

Lotte World Tower 81F - 300, Olympic-ro, Sincheon-dong
Songpa-gu -  Seoul

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