Croisière au-delà du cercle polaire arctique
Régulièrement, les navires de la compagnie Hurtigruten sillonnent la côte norvégienne. Au cœur de l’hiver, ce ferry légendaire nous emmène pour une croisière en quête d’aurores boréales et d’une nature furieusement sauvage.
Posée sur la mer de Barents, Kirkenes est la dernière ville norvégienne avant la frontière russe, aux confins de l’Europe du Nord. Le ferry y débarque son fret, là où l’accès routier est inaccessible l’hiver arrivé. Les passagers de l’Express Côtier essaient de marcher sans glisser sur le quai gelé, dans un vent à décorner les rennes, sous un ciel bleu cobalt. Quelques touristes débarquent, des familles norvégiennes aussi qui empruntent le bateau comme vous voyageriez en train, en bus. Le ferry ne va rester à terre que deux petites heures, juste le temps pour les dockers de débarquer leur marchandise (produits pour la superette, les restaurants locaux, matériaux de construction), avant de que le navire reprenne sa route vers le sud, s’arrêtant à chacune des 34 escales qui rythment les croisières de la flotte d’Hurtigruten. Celui que l’on surnomme l’« Omnibus des fjords » forme, depuis 130 ans, une ligne de vie sur les 2500 kilomètres de côte norvégienne. Kirkenes est un grand bourg de maisons de bois encore enguirlandées des fêtes de Noël. On s’attend à croiser Santa Claus à chaque coin de rue. Des centres commerciaux de luxe ont poussé ici et là, construits pour les voisins russes qui venaient il y a encore peu en quête d’emplettes. Plus loin, d’un coup de minibus, on file, tiré par des chiens de traineau, au travers des montagnes, glisse sur un fjord gelé, s’arrête au bord d’un trou creusé dans la glace, pêche quelques crabes géants du Kamchatka qui pullulent à 200 mètres de profondeur...
AU BOUT DU MONDE
Hier encore, la robuste silhouette noire, rouge et blanche accostait non loin du Cap Nord, ce bout du monde à l’extrême nord de l’Europe. On se prenait en photo devant le globe terrestre en métal, partageait le sentiment de réaliser un voyage initiatique, arpentant ce bout de terre, le regard perdu vers l’océan infini baigné d’une lumière magnétique. A Tromso, nous arpentions les montagnes raquettes au pied, là où vivent les élans et les rennes. Notre guide restait vigilant, guettant la possible présence du glouton (gulo gulo). Terreur du Grand Nord, cet animal qui peut atteindre 120 centimètres est un redoutable prédateur, d’une voracité sans égale, aussi rusé que puissant et surnommé « esprit maléfique » par les tribus locales.
UN PERIPLE UNIQUE
Hammerfest, Tromso, les Vesteralen, les Lofoten, Trondheim et enfin Bergen, capitale du sud du pays aux quais bordés de façades colorées, classées au patrimoine mondial de l’UNESCO, sont autant d’escales au cœur des fjords norvégiens. Autant d’expériences, d’une navigation souvent nocturne en cette période de l’année où les aurores boréales éclairent le ciel de rose, de vert, d’orange et de bleu. Elles sont dues à une interaction entre les particules chargées du vent solaire et la haute atmosphère. On en perd le nord, la boussole, le rythme du sommeil. Les escapades se succèdent. Rencontre avec les Samis, pasteurs des steppes, et leurs troupeaux de rennes, safaris aux aigles dans les fjords, observation des baleines, navigation à bord d’un puissant Zodiac au cœur du mythique maelström de Salstraumen où Jules Verne fit disparaître le Nautilus.
CHALEUR ET SIMPLICITÉ
La décoration du bateau est d’une simplicité de bon aloi, cabines de bois blond décorées de photos en noir et blanc, couette merveilleusement douillette. Ici pas de dress code, point de soirée du capitaine, pas de casino. On est bien loin de « La Croisière s’amuse » et plus proche d’un roman de Jack London. Le tourisme laisse la place au voyage. La table n’est pas en reste. On y mange réellement délicieusement. Une nourriture saine, locale et fraiche, embarquée au fil des escales, crabe arctique, canard de Vestfold, cabillaud des Lofoten, renne, saumon sous toutes ses formes. Des produits sourcés, estampillés de leur lieu de production, du nom du fermier.
130 ANS D’HISTOIRE
C’est en 1893 que le capitaine Richard With quitte Trondheim en direction de Hammerfest à bord du navire à vapeur de Vesteraalen, lançant ainsi l’aventure d’Hurtigruten, « La route rapide » en norvégien. Transport de courrier et de matériaux, puis petit-à-petit transport de voyageurs. Il sera le premier à cartographier les côtes du Grand Nord, à oser naviguer de nuit dans les fjords les plus étroits. Sans doute est-ce aujourd’hui l’une des navigations les plus spectaculaires au monde, à la recherche d’aurores boréales en hiver, en quête du soleil de minuit au solstice d’été. Outre la découverte des côtes norvégiennes, la compagnie propose aujourd’hui des croisières en Islande et au Groenland, une croisière d’expédition d’un pôle à l’autre, du Haut-Arctique à l’Antarctique, le passage du Nord-Ouest, les Îles Galápagos…
Contact : www.hurtigruten.fr
Tel : 01 58 30 86 86