Évasion au Mexique : San Miguel de Allende, planque inspirée
Son nom fleure bon la légende du Mexique. On imagine une cathédrale, des chevaux qui piaffent sur les pavés de la plaza, les belles sous l’ombrelle, des palais frappés de nobles armoiries, un marché coloré… Bienvenue à San Miguel de Allende.
La carte postale en jette tellement que l’Unesco l’a classée au Patrimoine mondial. Mais fi des breloques, à 315 kilomètres au nord de Ciudad de Mexico, San Miguel de Allende la joue discrète. Elle n’a rien contre les visiteurs qui encombrent ses ruelles (1 900 mètres d’altitude, attention au souffle), la recette est bonne à prendre. Mais plus que tout, ses 70 000 habitants cultivent d’excellentes relations avec leurs voisins américains. Ici, on l’assume : Yankees, bienvenidos ! Le dollar a meilleure allure que le peso. Mais pas que.
Certificat de charme
Dans les années soixante-dix, une poignée d’artistes débarqués de New York, Miami ou Los Angeles, a flashé sur le charme éperdument colonial de l’endroit, sur ses lumières d’infinie pureté, sur la touchante simplicité de ses habitants. Et hop, j’installe mon atelier, je peins, je tisse, je déclame la beauté du verre, de la terre ou du papier mâché, je hisse San Miguel de Allende au rang de pépite arty inspirée. A la manière de Mougins, Bali ou Formentera, la ville tenait son certificat d’agrément, elle ne l’a plus lâché.
En dessous du million de dollars
Du coup, portés par ce souffle de liberté, trop cool la vie ici, plusieurs milliers de résidents américains y ont jeté l’ancre. Et ça dure. Vive les délices de la retraite, du télétravail, de la planque à l’abri des urgences ! En témoignent les agences immobilières qui fleurissent le long des ruelles du quartier historique, celui de la cathédrale. Leurs vitrines affichent maisons avec jardin et piscine, bien en dessous du million de dollars. Un prix cadeau pour un avocat texan ou un chirurgien venu de Californie. Affaire conclue. Toute la ville, supermarché, médecin, restaurant, coiffeur, va bientôt boire à la fontaine de billets verts. Cela mérite bien un sourire.
Les Louboutin, on verra demain
San Miguel de Allende s’enroule autour de sa cathédrale de pierres roses, une splendeur. Au plus haut, brille la croix, lumineuse sentinelle, gardienne de mémoire et de temps. La statue de frère Juan de San Miguel, le premier (1592) à traîner sa bure sur ce monticule dominant large ses alentours (on n’est jamais trop prudent), garde l’édifice. Paternaliste, il protège un péon apeuré, ignorant qu’il gagnait son éternité de bronze. Le selfie sera top. Depuis le monument filent des ruelles pavées de caillasses qu’ont lustré des siècles de godasses, de sabots et de charrettes. Attention les chevilles ! Sneakers vivement recommandés, les Louboutin, on verra demain. Puis les vents nouveaux se sont levés, poussant la ville vers le large où elle s’inventa d’autres quartiers, moins instagrammables, plus dans les banalités de la modernité.
Placettes tapissées de bougainvillées
Durant les trois ou quatre jours que justifie l’étape, les vacanciers se concentrent donc sur ce quartier séculaire, tout de charme et de trésors. Dans un entrelacs de venelles étroites et de placettes tapissées de jasmins et de bougainvillées jetant leurs blancs, rouges et mauves entre palmiers et eucalyptus géants, s’alignent les maisonnettes d’un étage aux impeccables façades pastel. San Miguel de Allende veille à ce que sa tenue demeure irréprochable.
Une boutique ouvre sur la rue, le patio rayonne à l’arrière, l’habitation se trouve au-dessus. La plupart recèlent de véritables caches aux trésors. Ici un atelier de céramiques, là une modeuse inventive à moins que ce soit un orfèvre, plus loin, le fouillis d’un artisan (sculptures, toiles, métal, terre cuite, prouvent la vitalité de l’artisanat mexicain) jouxte un restaurant confidentiel. Chaque porte, son euphorie, chaque rencontre, sa part d’émerveillement. D’accord, les prix n’ont rien de désuet, mais ils s’élèvent au gré d’une
créativité introuvable ailleurs. Alors...
Pour l’envie, craquer
Pousser un peu plus loin jusqu’à la halle du marché San Juan de Dios. Chaque matin, il bat le tempo de la ville, lui donne couleurs et papotages. Entre deux étals de fruits, de viande, de bondieuseries et de casquettes de base-ball, on prend les nouvelles du cousin, du mariage de la petite, des fraîcheurs livrées demain. Allez, on achète un billet de loterie, tirage ce soir, sans oublier de se signer devant la statue de la Vierge érigée en plein milieu, elle s’y connaît en bons numéros.
Ensuite, direction la rue semi-piétonne Lucas Balderas, temple local de l’artisanat mexicain. Défilent alors mille talents, du travail de la perle aux masques de la Fête des morts, une solide tradition mexicaine, des bagouzes pour rappeur américain aux galures de Zapata, des miniatures d’émail peintes à la main aux bottes des rodéos de vaqueros jusqu’aux étoles et ponchos dernier cri… Flâner, s’étonner, admirer. Une envie, craquer. Oui, la carte de crédit est partout acceptée.
Dos margaritas, por favor
Bonne nouvelle, cette magie coloniale, recèle une cachette 5-étoiles en totale harmonie avec elle, l’hôtel Rosewood. Passée la porte monumentale, on jurerait entrer dans la demeure d’un marquis conquistador venu d’Andalousie se couvrir d’or. Solides pierres apparemment séculaires, promenades sous les colonnades, bois sombre patiné, lourdes tentures, cheminées monumentales et salons douillets… L’art de vivre au meilleur de son élégance a trouvé son cocon.
Oui, mais. La maison a été construite il y a une dizaine d’années seulement. Bravo, elle est plus vraie qu’un original, plus désirable aussi car dotée de tous les agréments du confort moderne. Tables de grande classe, 67 chambres et suites de haute tenue, Spa, bar aux 70 références de tequila, ce soir, dos margaritas por favor !, un autre bar à tapas en roof top, quatre piscines, fitness center, courts de tennis, galerie d’art… La maison livre ses délices en cascade, enrichis de centaines d’œuvres mexicaines modernes, d’alcôves pour menottes qui se serrent, de fontaines et de parterres fleuris.
Zinnias, yuccas et oiseaux de paradis
Mieux encore : un jardin exceptionnel de plusieurs hectares enchante l’enclos Rosewood. Une centaine de mains vertes veillent à ce tableau nature qui marie cyprès, dahlias, zinnias, palmiers, soucis, yuccas, orangers, mamillaires, anthuriums, jacarandas, hêtres, oiseaux de paradis et tant d’autres. Dans cet Eden multicolore, un banc de pierre, une tourterelle, la caresse d’une brise légère, le temps fait la pause. Souffle alors l’esprit de frère Juan de San Miguel. Et la vie devient soudain très belle.
Hôtel Rosewood
San Miguel de Allende, Calle Nemesio Diez 11, Col. Centro, San Miguel de Allende.
Tél. : 00 52 415 152 97 00
rosewoodhotels.com/sanmiguel